Une femme blanche au coeur noir
C'est le début d'une histoire que je suis entrain d'écrire....
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I/ LE BLANC INNOCENT
Elle n'a vécu que quelques années , c' était une jolie petite fille blonde avec de grands yeux bleus et un visage d'ange... Il ne subsiste que deux photographies où on peut l'apercevoir
avec mes grands frères et ma mère.
Je suis née un an jour pour jour, après qu'elle soit partie au ciel , mes parents ont donc interprété ma venue comme un cadeau de Dieu... Et j'ai grandi en voyant dans leurs yeux le souvenir de cette petite fille qui leur manquait tant. Alors je me suis promise vers mes six ou sept ans que je n'apporterais à mes parents que du bonheur et de la joie.
1937 fut l'année de ma naissance comme celle de Lionel Jospin, ou encore de Francis Veber , ou même de Dustin Hoffman, de Robert Redford ou d 'Anthony Hopkins, on pourrait en conclure rapidement que c'est une bonne année , mais l'avenir du monde commençait à s'assombrir , le Front Populaire prenait fin en juin 1937 , le fascisme se propageait et le célèbre souvenir de Guernica immortalisé par Picasso s'inscrivait dans l'histoire...
Les premiers souvenirs qui me reviennent , j'avais deux ou trois ans , la guerre venait d'éclater, on vivait avec mes parents à Nancy . Tout se bousculait , je me rappelle de la panique générée par l'armistice signée le 22 juin 1940. Nancy se trouvait en zone occupée et cela allait chercher notre vie ...A partir de mai 1940 beaucoup de nos voisins ont fui cherchant refuge ailleurs laissant aux occupants allemands les souvenirs de toute une vie pour sauver la leur...
Nous on a attendu , la famille de ma mère était aisée, mes premiers années furent assez douces , on ne manquait de rien , la vie n'était que jeu , tendresse et découverte... J'ai le souvenir que peu de temps avant qu'on décide de partir mes seules préoccupations étaient d'embêter ma cousine , de la surveiller et de tout répéter!!! Un jour le médecin de famille est venu pour mon père , puis ma cousine l'a raccompagné et je me suis cachée , le médecin a emmené ma cousine dans la grange à coté du moulin et il a soulevé la robe de ma cousine, je ne voyais pas tout et à trois ans je ne comprenais pas , mais j'ai entendu ma cousine « réagir » , alors avec mes propres mots j'ai demandé:
- « Que faites vous?, Rebecca a mal quelque part ? »
Le médecin avec un petit air coquin m'a répondu tout en saisissant une branche de persil cueilli peu de temps avant « Rebecca ne se sentait pas bien , je lui prenais sa fièvre avec la branche de persil... »
Dans ma petite tête ni une ni deux , je courus voir ma mère et ma tante tout en criant « Venez Rebecca est mal le médecin prend sa fièvre avec du persil dans la grange....!!! » Soudain ma tante bondit , courut à la grange , moi je m'attendais à ce qu'elle prenne soin de Rébecca , mais elle la saisit par le bras et lui dit « Ma fille tu es une vraie calamité , comment trouver à te marier si tout le monde sait que tu es une fille facile... » Et là « jouer au docteur » pris un autre sens pour moi...!!!
Je ne comprenais pas , ma cousine ne me parla pas pendant des jours , me reprochant de fouiner partout et d'avoir une grande langue... « Tu comprendras plus tard, ma petite Barbara... Allez viens en va voir René travaillait dans son atelier ».
René c' était mon père , il était cordonnier et avec Rebecca ont aimé bien le regarder fabriquer de ses mains de charmante petite chaussure à partir d'un morceau de cuir et d'une semelle... Mon père n'a pas eu mon enfance , né de parents juifs italiens et belges , il fut abandonné par sa mère , il eu une très bonne éducation chez les frères dominicains , mais il lui a toujours manqué l'amour et la chaleur d'une famille...Beau garçon , ma mère le repéra un jour à Nançy , lorsqu'avec ses frères elle se baladait cherchant une nouvelle petite robe ou des chaussures , elle rentra dans la l'échoppe où il était en train de travailler , elle le regarda longtemps, le salua , puis sorti sans rien n'acheter , mais en priant ses frères de bien vouloir aller voir ce jeune homme et le convier à souper avec eux le vendredi soir... Surpris mon père refusa au début et là , un de mes oncles lui dit , « Tu sais quand ma soeur veut « quelque chose » , elle l'obtient toujours , tu lui plais , alors viens »...
Mon père accepta et le vendredi , ils dînèrent tous ensemble, mon père était intimidé , mais ma mère avait eu ce qu'on appelle « un coup de foudre » et ne comptait pas le laisser s'échapper. Ils se virent plusieurs fois , au début en présence de mes oncles , puis seuls , et peu a peu une complicité , une tendresse profonde naquirent... D'ailleurs j'ai toujours dans les yeux de maman cette complicité doublée de passion et dans ceux de mon père , la tendresse et la raison...
Puis ils se marièrent , eurent mes grands frères et moi ... Bien qu'aisé par le biais de la famille de ma mère , mon père voulut continuer de travailler le cuir, il était réputé à Nancy , beaucoup de femmes riches aimaient se faire faire des chaussures sur mesure. Et c'est comme ça que moi et
Rebecca ont passé des heures entières avec lui dans sa boutique. Il nous racontait les bêtises qu'il faisait au pensionnat , son service militaire , sa rencontre avec maman , les souvenirs de sa mère , et son attachement à la culture juive et sa soif de spiritualité... Mon père voulait tout comprendre , il lisait beaucoup , se passionnait pour la religion, la politique ...Manuel et intellectuel , il était admiré de ma mère , de mes tantes , et même de ses clientes..Ce qui agaçait ma mère par dessus tout...
Cependant les choses futiles de la vie comme la jalousie ou la fidélité allaient passer au second plan le jour où un des frères de ma mère fut abattu par des allemands . Une après midi , ma mère était seule avec ma tante et mon oncle était dans la grange quand des officiers allemands accompagnés de policiers français surgirent dans la cuisine les pressant de leur révéler le nom de certains opposants politiques résidant dans notre quartier , précisant qu'ils détenaient certaines informations sur nous...